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Magyar költök versei magyar& francia nyelven. Linda& Tebinfea

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Petőfi Sándor Emlékpad. "Mit rákentek a századok lemossuk a gyalázatot!"

Petofi Sandor EMLEKPAD az 1848-as szabadsagharc költöje

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jeudi 10 novembre 2011

Les Danaïdes

Les Danaïdes

Là-bas, au fond, au plus profond des tristes enfers du silence que nulle brise ne caresse, tout au milieu des asphodèle, et l'asphodèle est sans frisson, l'arbre du deuil est immobile, le pavot jamais ne s'effeuille, car le vent dort d'un grand sommeil, jamais ses lèvres ne s'agitent.

Ici, pareils à des miroirs couleur d'acier, les étangs rêvent; nulle ride, et les cils demeurent, comme assoupis, car leur frisoir, cet éventail de mousseline, le vent, ici dort en son gîte;

Dans d'immenses vases d'albâtre,cinquante femmes pécheresses versent et déversent sans cesse; cinquante damnées à jamais, font ainsi pour l'éternité;

Ces femmes tristes et damnées, versent en vain dans les amphores, de grandes amphores d'albâtre, l'eau qui jamais ne leur suffit, le précieux suc du Léthé.

Arbres funèbres, vastes troncs dressant leur silhouette sombre, sans agiter jamais leurs branches;

chacun étant l'âme dolente, l'âme antique d'un suicidé végétant sur l'arbre muet; sensible mais inconscient, le grand arbre étend son feuillage immobile à travers les prés,

à travers le pré où il draîne l'eau polluée par tant de crimes, le Léthé (car c'est lá son pré) poursuit son éternelle course

sans jamais atteindre la mer, en décrivant sept fois un cercle avant de rejoindre sa source,

et là, dans leurs cinquante amphores, pour répandre toujours en vain ondes et pleurs, les pécheresses

emplissent et vident en vain cinquante magiques amphores ne pouvant jamais se remplir, pas plus que ne le peut la mer, qui toujours monte et se retire; et puis les cinquante damnées versent dans des vases d'albâtre, vainement cette eau du Léthé que l'on puise et verse sans cesse;

cinquante femmes au corps pâle, drapées dans leurs longs cheveux noirs, sensibles mais inconscientes, sans fin besognent en chantant;

cinquante femmes à voix basse chantent des demi-souvenirs qui montent d'un lointain passé plein de larmes et de tourments:

«Nous avons tué nos époux, cinquante hommes vaillants et forts, pour nous adonner à l'amour. Dieu sait qui nous avons aimé, puisant au vase du désir, puisant et versant tour à tour, dans la lumière de la terre, sous un ciel brűlé de soleil.

Et d'anciens morts hantent nos âmes, lueurs tombées du haut des rues dans l'ombre de chambres immenses. Le sens maintenant nous échappe. Ah! Qu'est-ce qu'aimer voulait dire? Qu'est ce que chérir ou étreindre? Nous cherchons dans nos souvenirs et nous questionnons les ombres, en vain dans l'ombre de l'esprit.

Nous ne pouvons plus que chanter: nous avons tué nos époux et nous en gardons la mémoire; nous chantons sans rien y comprendre et nous puisons et nous versons sans pouvoir jamais arrêter. Nous chantons même sans comprendre, car sinon c'est le grand silence, le silence qui nous effraie, l'immense obscurité muette où notre âme apeurée frémit.

Ainsi chantent cinquante femmes, les cinquante tristes damnées semblables sous leurs cheveux noirs; cinquante sœurs au corps d'albâtre chantent sur les prés du Léthé, au milieu des rameaux des âmes, les pavots, les lourdes amphores, au bord du Léthé, calme gîte.

là-bas dans les tristes enfers où rien n'est plus que le silence, calme gîte du vent qui dort, blotti sur son lit d'asphodèles, sans que ses lèvres ne s'agitent.


Babits Mihály



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