L'égrenage du blé d'Inde
Le feu craque, il brille loin dans la campagne,
Sa fumée monte, rouge, vers le large ciel;
Autour, quelques arbres,
Leur ombre effrayante s'étend au loin;
Et assis autour, venant des fermes,
De beaux jeunes gens, de belles jeunes filles.
« Allez, vite! c'est un tas énorme: dépêchons!
Et ça ne se fait pas de chuchoter l'un près de l'autre.
La première qui trouve un épi rouge,
Elle aura sa noce à l'automne!
- Rajoutez-en! Que ça flambe!
Toi petit, occupe-toi du feu.
- Esther Dalos était une jolie fille, mais une orpheline.
Encore jeune pour les travaux des champs;
C'était dur de s'y habituer:
Dur de brûler et rougir au soleil,
(- Ah, il fera froid cette nuit, le vent pique!)
Dur pour sa taille de se courber.
À sa taille jolie et élancée, la faucille,
Sans que les tiges n'abîment ses jambes fragiles;
Elle est comme les blés, belle, épanouie,
Le visage rond, une belle poitrine,
(- Voilà la pleine lune qui se montre!)
Tout de cette fille est bien beau.
François Tuba garde les moutons aux environs,
Ses moutons broutent des herbes sur les mauvaises terres,
Il est si triste... Qu'est-ce qui lui arrive?
Sa flûte pleure et se lamente toujours,
(- Tiens! C'est Bodré qui chasse le renard!)
Il accompagne volontiers Esther Dalos.
Esther - elle est allée dans les champs,
Avec les moissonneurs, se reposant sur l'herbe tendre;
Mais quand le sommeil les gagna,
Elle quitta leur petite cabane
(- Ah, un sanglier qui casse les "glanes"!)
Ne le faites pas, vous les jeunes filles!
Les branchages des ronces déchirent sa robe de belle étoffe,
Les épines, les tiges font jaillir son sang rouge:
Où va-t-elle, comme une âme errante,
Quand les autres servants de ferme dorment?
(- Ça alors, que d'étoiles filantes aujourd'hui!)
Vous les filles, ne le faites pas.
François Tuba en a eu assez de la prairie,
Il est allé plus loin, il n'a plus joué de sa flûte;
Esther Dalos ne l'accompagne pas,
Elle est pâle, sa chanson pleure et se lamente:
(- Il y a beaucoup de rosée, ça tombe de plus en plus!)
Seul Dieu sait pourquoi elle se lamente.
Elle va, triste, sans but, dans les champs,
Et elle n'arrive à rien faire de ses mains;
Ses nuits sont longues, ses jours mornes,
Son cœur soupire - elle ne désire qu'une chose:
(- Allez, que ça saute, ce travail!)
Toi, mort, fais-moi un lit doux.
Cependant le temps est devenu un automne humide,
On moud déjà le blé d'Inde à Adony.
Mais Esther Dalos n'est pas venue:
Elle a déménagé pour le cimetière.
(- Ah, c'est la grosse cloche de Lombár!)
Que personne ne la méprise pour cela!
François Tuba est réapparu chez lui longtemps après,
Il entend, la pauvre Esther Dalos, ce qui lui est arrivé.
Il va souvent au cimetière,
Par mauvais temps, par beau temps:
(- Bon sang, maintenant la chouette qui hulule!)
"C'est là qu'ils ont leur repos, dans la terre gelée."
François, lui, ne peut plus trouver le repos sur son lit,
Les yeux fermés, c'est comme s'il va et vient au clair de lune;
Il entend de la musique au loin, tout en haut,
Et au milieu, la voix d'Esther,
(- Eh, ne dors pas, tu vas en rêver!)
Elle chante: "Viens! Allez!"
Eh bien, François a couru en haut de la meule,
Ensuite en haut du clocher en pointe du village;
Il s'accrocherait, mais il n'arrive pas jusque là,
Sa tête tourne: qu'est-ce qui lui arrive?...
- Allez, c'était les douze coups à Adony,
Ça suffit pour aujourd'hui, de raconter des histoires. »
Le feu baisse; les garçons sont dans leurs gros manteaux -
Les filles se serrent l'une contre l'autre avec leurs capuches;
Haut dans les airs,
Il y a comme un grand drap qui flotte:
Assis dessus ils font de la musique, entend-on,
Ils jouent de la flûte, d'un son lointain qui disparaît
Arany János, 1877
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