CONTRE LES ROIS
On sait qu’il faut toujours un jouet aux enfants.
Ainsi, quand ils étaient encore enfants, les peuples
S’étaient fait un jouet poli et tout brillant
Un fauteuil de pourpre, une couronne dorée
Qu’ils posèrent sur la tête d’un niais.
Et ils installèrent le niais dans le fauteuil.
Voici la royauté. Voici qui sont les rois !
Ces gens sont assis là, et la tête leur tourne
Ils ont l’absurde vanité de croire
Qu’ils règnent là par la grâce de Dieu
Mais vous vivez dans l’illusion, bon rois !
Vous n’êtes pas nos maîtres, vous êtes nos poupées !
Le monde est devenu majeur, et l’homme
Ne veut plus s’amuser avec ses jouets d’enfant.
Descendez, rois, de vos fauteuils de pourpre !
Arrachez la couronne de vos têtes !
Sinon nous viendront vous l’ôter nous-mêmes
Et rouleront bientôt la couronne et la tête.
Il en sera ainsi. Le couteau qui trancha
La nuque du roi Louis sur la place de Grève
Fut le premier éclair de cet orage
Qui déjà se prépare et qui bientôt
Va s’abattre sur vous aussi.
Ma voix n’est pas le premier coup de ce tonnerre.
La terre alors sera la vaste forêt vierge
Et dans cette forêt les rois seront traqués.
Ils seront le gibier nous serons les chasseurs !
Dans un élan de joie nous tirerons sur eux.
Et nous écrirons avec leur sang sur le ciel
Que le monde n ’est plus un enfant qu’il est un homme.
Petofi Sándor. décembre 1844
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