Ciel écumeux
La lune se balance sur un ciel écumeux
Je suis étonné de vivre encore.
Une mort trop zélée recherche ceux qui ont fait leur temps
et ceux qu'elle trouve sont tous très pâles.
Parfois l'année regarde autour d’elle et hurle,
regarde autour d’elle puis s’évanouit.
Quel automne se tapit à nouveau derrière moi
et quel hiver, abattu par la douleur.
La forêt perd son sang et dans le temps qui se déroule
le sang coule à chaque heure.
Tant et tant ont été
griffonné par le vent sur la neige.
J'ai vécu pour voir cela,
l'air est si lourd pour moi.
Un silence empli des murmures de la guerre m’enserre,
comme avant ma naissance.
Je m'arrête là, au pied d'un arbre,
sa cime se balançant avec colère.
Une branche descend sur moi - pour saisir mon cou ?
Je ne suis pas un lâche, je ne suis pas un faible,
Juste fatigué. Je l'écoute. Et la branche apeurée
examine mes cheveux.
Tout oublier serait le mieux, mais je n'ai
jamais rien oublié encore.
l’écume se déverse sur la lune et le poison
dessine une ligne vert sombre à l'horizon.
Moi je me roule une cigarette
lentement, méticuleusement. Je vis.
Radnóti Miklós. 8 juin 1940
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